NIL BORNY déterre les Zombies

Interview de Marion Routinologist, réalisé début 2018

Bonjour Nil, Tout d'abord merci d'avoir accepté de répondre à mes questions 

Je vais être honnête avec vous, à la base, j'avais pensé faire une série de portraits de femmes auteures, dans une volonté féministe ou de solidarité, ce n'est pas très clair pour moi. Puis, quand je vous ai vu débarquer avec vos zombies, seul au milieu de la vague de fantasy qui déferle sur le milieu indé, j'ai changé d'avis.

(Ceci appelle une réponse, même s'il n'y a pas de point d'interrogation ;-) )

  J'en suis très flatté ! Sachant pertinemment que vous n'avez pas lu mon histoire qui est peut-être aux antipodes de ce que vous imaginez. Vous prenez là un énorme risque professionnel ! Sachez que j'en suis conscient et si par malheur vos abonnés fuient votre blog comme la peste après mon passage, j'aurai une sincère pensée pour vous...

 Je m'excuse également de mon addiction aux petits mots stupides que je suis susceptibles de semer durant cet interview.

Vous l'avez compris, j'adore les histoires de zombies. Le début de la faim, votre livre, est plus proche de Roméro ou de Walking Dead ? (Je veux dire est-ce qu'on y trouve un côté second degré et critique sociale, ou c'est plus sérieux dans l'hémoglobine ?)

  Les films de Roméro m'ont bien entendu inspiré, puisque j'ai baigné dedans durant toute mon adolescence. Collectionneur invétéré de Comics, je suis également un grand fan de Walking-Dead que j'ai découvert sous sa version originelle qu'est la BD et ce, bien avant que la série n'envahisse nos petites lucarnes. L'aspect relationnel entre ces personnages m'a immédiatement plu, même si lors de mes toutes dernières lectures le style commence à s'essouffler et devenir presque lassant et prévisible. Néanmoins, je ne peux pas nier avoir été inspiré par cette série. Ce sont les réactions des vivants qui nous passionnent et non les "greuhhh" et"bweuaaa" des pauvres hères desséchés qui arpentent péniblement l'asphalte en quête de nourriture. En plus, on ne sait toujours pas pourquoi...

  Concernant le second degré, quand l'humour est présent dans ce genre, il est très souvent synonyme de "Nanar"... et pas seulement dans les films...

  Que peut-on écrire de nouveau sur des zombies ?

  "Pas grand chose !" fut ma première réaction.

  Ayant lu une kyrielle de romans sur le sujet, j'ai tenté de me concentrer sur ce qui n'était pas ou avait été rarement exploité dans ce domaine. Malheureusement, je ne peux pas en dire plus, sous risque de "spoiler" une petite nouveauté aperçue dans ce premier livre et qui va prendre une telle ampleur que le futur titre en sera la conséquence directe. 

  J'avoue que les trois-quarts de ces romans ne sont pas très palpitants et se contentent de narrer la survie d'individus confrontés à des macchabées ambulants qui n'ont que comme seul et unique objectif de les bouffer. Très souvent l'intrigue respire le déjà-vu et les quelques rebondissements sont malheureusement prévisibles. Se coltiner des centaines de pages pour lâcher un timide "Pffff" en reposant son bouquin sur le coin de la table de nuit n'est pas ce qu'il y a de plus enrichissant. Bien évidemment, quelques-uns sortent du lot, mais pourquoi faire de la pub à des types reconnus et qui en vivent !?

  En dépit de ma première réaction et pas très convaincu de l'avenir de mon histoire, j'ai entrepris ma rédaction qui s'est avérée bien plus passionnante qu'elle ne le laissait sous-entendre. Par contre, j'ai été bien incapable de le faire sans ajouter quelques petites touches d'humour, sans forcément sombrer dans le loufoque. Je ne sais pas pourquoi mais il m'a semblé tout naturel d'alléger la teneur bien lourde de ces évènements lugubres. Peut-être était-ce pour me rassurer moi-même ?

  J'aime à penser qu'un personnage poursuivit par une meute sanguinaire de cannibales ressuscités songe soudainement au fait qu'il ait oublié d'éteindre le gaz.

  Indépendamment de l'humour, j'ai adoré sauté d'un sentiment à l'autre jusqu'à créer ce qui me paraissait impensable : une histoire d'amour, même si elle est complètement surréaliste et décalée. Sinon, quelle était la question ?


Vous qualifiez vous-même votre roman de : "roman de gare de RER". Alors, un roman de gare, je vois ce que c'est, mais un roman de gare RER...c'est un roman au trafic perturbé ?

  Perturbé ! Vous avez mis le doigt dessus ! Mon écriture est tout bonnement perturbée !

  Un roman de Gare est généralement peint comme un livre de seconde zone voyageant en seconde classe. Quelle bêtise ! Aussi, j'ai décidé d'un commun accord avec moi-même de trouver une appellation à mon roman qui soit encore plus minimaliste et idiote. Que voulez-vous, j'adore me tirer une balle dans le pied...

  J'abhorre ce côté péjoratif et stupide qui est de catégoriser un livre. Un roman n'est-il pas un récit qui nous permet de nous évader ? Alors, pourquoi pas en RER ?

  Notez que je ne prends jamais le RER et que d'ici une petite semaine je suis susceptible de vous donner une autre explication. Mais, ceci est une autre histoire...

J'adore la couverture de votre livre, elle me rappelle ceux qu'on trouvait chez mes grands-parents, quand j'étais enfant, et qu'on m'interdisait de lire. Est-ce que c'est vous qui l'avez faite ou vous avez fait appel à un dessinateur ?

  Merci pour le coup de vieux !

  Mon temps étant compté, j'ai tout de même esquissé un magnifique croquis qui avait comme particularité d'être vraiment moche.

  Peu de temps avant de me décider enfin à publier mon "bébé", lors d'un salon BD, j'ai fait une rencontre fort sympathique avec un dessinateur indépendant et talentueux, Paskal Millet. J'ai découvert notre passion commune pour les cadavres gesticulants. Après maintes sollicitions de sa part, j'ai enfin cédé aux caprices de l'artiste en acceptant qu'il réalise ma couverture. Bien évidemment, c'est le contraire. Ne sachant pas encore que mon livre verrait le jour, j'ai fait appel à son professionnalisme pour avoir le privilège d'être détenteur d'un "zoli" dessin que je pourrai placarder dans mon bureau.

  Paskal a plusieurs bouquins à son actif dont Monsters (chez Y.I.L) qui m'a beaucoup étonné puisqu'il a la particularité de présenter différents personnages, tout comme la première partie du Début de La Faim. Et le pire est que l'on y retrouve les prénoms de certains de mes protagonistes (Louis, Natacha, Joseph, Henri, Quentin) et même mon vrai prénom qui est très peu courant (Dieu soit loué !). Actuellement, il sort son second comics avec un scénariste italien talentueux, Massimo Rosi. 

J'ai aussi vu sur Facebook, que vous aviez fait une petite vidéo de promo avec les moyens du bord. Vous vous débrouillez quand même pas mal coté marketing, comment procédez-vous?

  Vous parlez du petit court-métrage réalisé avec une caméra et un téléphone, je suppose. J'ai quelques notions de photographie et de montage vidéo, que j'utilise de temps à autre dans ma vraie vie professionnelle. Un peu de patience et beaucoup d'amusement lors du tournage où nous nous sommes gelés et... le tour était joué ! 

  Le plus marrant est que je ne supporte pas le sang. Nous en avons fabriqué à l'aide de farine, de café soluble et d'un colorant alimentaire. Tout ça pour finalement faire un film en noir et blanc...

  Concernant Facebook et mon site web , j'ai dû me mettre à l'ouvrage et apprendre. C'est long mais ce n'est pas forcément bon...

Avant de vous autoéditer, avez-vous essayer de faire paraître votre roman en maison d'édition traditionnelle ? Si oui, quel a été votre cheminement jusqu'à aujourd'hui ?

  À ce jour, je suis toujours dans l'attente de réponses qui ne viendront sans doute jamais. Peu importe ! J'ai concrétisé mon envie de publier mes "insipiditudes" et c'est tout ce qui compte. Toucher ne serait-ce qu'une personne avec mes histoires funambulesques est la plus belle des récompenses. À ce jour j'ai découvert des commentaires plutôt flatteurs sur Amazon et venant d'inconnus, mes amis étant trop feignants pour faire quoi que ce soit... C'est la plus belle des reconnaissances !

  Pour anecdote, mon premier envoi a été adressé aux éditions du Fleuves. J'étais tellement fébrile qu'au lieu de lire "Titre du manuscrit", j'ai compris "Type de manuscrit". De même, visant plusieurs éditeurs, j'ai formulé un courrier type que j'ai oublié de corriger avant de leur faire parvenir. Je leur ai donc adressé un roman intitulé : "Tapuscrit au format pdf" à l'attention du comité de lecture "Tartempion".

  C'est à ce moment précis que j'ai compris que cette voie ne me ferait jamais manger autre chose que des pommes de terre.

J'ai vu sur votre site que Le début de la faim est distribué dans 5000 points de vente, ce qui est plutôt rare pour un auteur indé, comment vous y êtes-vous pris ?

  Après maintes recherches, j'ai choisi d'éditer mon roman chez Bookelis. Il peut être tiré à l'unité lors d'une commande sur le site. J'ai fait deux tirages d'essai assez qualitatifs pour me convaincre de pouvoir enfin publier mon labeur.

  J'ai ajouté une option intitulé "Pack Hachette". Ainsi, le roman peut-être distribué chez tous les alliés de cette célèbre maison, représentants environ 5000 points de vente. Cette option coûte un peu moins d'une centaine d'euros par an et n'est pas forcément reconductible, ce qui est plutôt rassurant. Elle a également le mérite de rendre l'œuvre (quel grand mot !) visible sur des sites comme Amazon et la Fnac.

  Seul bémol, il existe deux options : vente avec retour et vente ferme. Prudemment, j'ai jugé moins téméraire de choisir la seconde qui me donne néanmoins une petite visibilité.

  Même si l'option de vente avec retour a un gros avantage : voir son livre dans les rayons d'une Fnac ou d'une autre grosse enseigne, pouvoir organiser des séances de dédicaces et sortir un peu de l'ombre, elle cache une énorme problématique. En cas de non vente de vos ouvrages, les frais de fabrication sont à votre charge. Pas besoin d'extrapoler les dommages collatéraux possibles...

Je trouve que la littérature dite "de genre" est souvent sous-estimée par les professionnels du livre, alors que les lecteurs sont au rendez-vous, et vous, qu'en pensez-vous ?

   Un livre n'est rien d'autre qu'un produit commercial. S'il n'est pas vendu, il n'y a aucun bénéfice, il est donc sans aucun intérêt pour la maison d'édition. Le peu d'éditeurs qui ont eu la courtoisie de me répondre défavorablement l'ont fait de la plus délicate des manières, jugeant mon style efficace mais pas en adéquation avec leurs publications du moment... Je n'en pense pas un mot !

  Concernant la littérature dite "de genre", il n'y pas à aller très loin pour découvrir qu'elle est minoritaire, ne serait-ce que sur mes demandes de chroniques auprès de blogeurs.

 Les rayonnages français sont majoritairement constitués de Polar. Nous n'y pouvons rien! Les vendeurs s'adaptent au marché ! Le français moyen adore le polar. Même si c'est toujours cet imbécile de colonel Moutarde qui s'est fait trucidé dans la buanderie avec le fer à repasser de Madame Bégonia... Soupir...

Est-ce que Le début de la Faim est votre premier livre ou bien vous œuvrez ailleurs, sous d'autres pseudos ?

  Le Début de la Faim est mon tout premier roman. Je n'ai que ce pseudo. Mon écriture est intuitive et réalisée sans aucun plan et sans fiche/personnage. Cela me permet d'avoir une écriture spontanée, même si quelque fois, il faut batailler pour retomber sur ses pieds. Si je parviens à me surprendre, il en sera de même pour le lecteur. Ce roman n'est pas un "one-shot", comme on dit vulgairement en Bretagne (ou Normandie, je ne sais jamais). La seconde partie, en cours de rédaction et mieux rédigée puisque second roman, sera plus affreuse et paradoxalement plus drôle. Actuellement, je n'ai aucune idée comment tout cela va finir et cela me convient parfaitement. Voila ce qui s'appelle de la digression...

J'ai cru comprendre qu'écrire n'était pas votre seule activité. Comment vous organisez-vous pour dégager du temps en dehors de votre travail ?

  J'ai deux activités que j'exerce simultanément la journée. Je me réserve une à deux heures en soirée pour vaquer à cette activité passionnante et chronophage, ainsi que le samedi matin et le dimanche matin.

  Je rêverai d'avoir un correcteur pour ne pouvoir qu'écrire et ne pas passer le plus clair de mon temps à tripoter mes textes dans tous les sens pour qu'ils ressemblent enfin à quelque chose de lisible.

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